ECRIRE SON HISTOIRE
LE GUIDE COMPLET
Sommaire
ETAPE 1 — Préparer le terrain
  • La boussole d’intention
  • Le pacte narratif personnel
  • Le micro-rituel d’ancrage
ÉTAPE 2 — Retrouver la matière vivante
  • La carte de vie émotionnelle
  • L’objet-passerelle
  • Le réveil sensoriel
ÉTAPE 3 — Structurer sans se perdre
  • La scène de bascule
  • Le canevas souple
  • Le nœud de clôture
ÉTAPE 4 — Trouver votre voix narrative
  • Le jeu des trois voix  
  • Le filtre stylistique
  • Le miroir du lecteur
ÉTAPE 5 — Naviguer entre mémoire et vérité
  • Les deux versions
  • Le souvenir-écran
  • La carte des silences
ÉTAPE 6 — Parler des autres sans trahir
  • Le portrait sensible
  • Le pacte de discrétion
  • La lettre non envoyée

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ÉTAPE 7 — Écrire sans se submerger
  • Le bouclier narratif
  • Le détour symbolique
  • La fenêtre d’intensité
ÉTAPE 8 — Relire, relier, relancer
  • La relecture douce
  • Les fils visibles
  • Le passage oublié
ÉTAPE 9 — Finaliser et transmettre
  • Le point d’arrêt
  • La quatrième de couverture imaginaire
  • Le geste de clôture
CONCLUSION
  • FICHE BONUS — Le texte-cadeau

3

Introduction
Écrire sur soi n'est pas un simple projet d'écriture. C'est un besoin de sens, de transmission, d'alignement. C'est vouloir retrouver la trace de ce qui nous a traversés, et peut-être, en laisser une aux autres.
Votre besoin d'écrire
On écrit parfois pour comprendre, parfois pour transmettre, parfois parce qu'une force intérieure nous y pousse. Écrire sur soi est un voyage personnel unique.
Votre histoire est unique
Vous n'avez pas besoin d'une vie extraordinaire pour écrire. Ce que vous portez est déjà unique et irremplaçable. Vous êtes le seul maillon de la chaîne à pouvoir en parler ainsi.
Pourquoi cette boîte ?
Beaucoup d'auteurs s'arrêtent en chemin, non pas faute de talent, mais faute de repères. Cette boîte à outils est conçue pour vous guider.
Ce que la boîte vous offre
Elle vous accompagnera de façon souple, concrète et rassurante. Elle vous aide à écrire ce qui compte, à rester libre, lucide et aligné(e), sans jamais vous dire quoi écrire.
Ce que vous allez y trouver
Des repères clairs
sur les étapes de l'écriture autobiographique
Des outils concrets
activables immédiatement, testés, adaptables
Des exercices pratico-pratiques
sans jargon, mais jamais simplistes
Une approche respectueuse
de votre rythme et de vos zones sensibles
Chaque outil a été conçu pour ouvrir une porte : celle d'un souvenir, d'un choix, d'un élan ou d'une clôture.

4

Comment l'utiliser
Le guide suit 9 grandes étapes, de l'élan initial à la transmission finale.
Chaque étape comprend :
  • Une mise en contexte
  • Trois fiches-outils, chacune avec :
  • un nom clair et imagé
  • un "Pourquoi / Quand / Comment"
  • un exercice concret à réaliser
  • parfois une variante pour adapter l'outil à votre sensibilité
Vous pouvez suivre l'ordre… ou piocher selon vos besoins. Ce guide est au service de votre processus, pas l'inverse.
En complément : votre carnet d'exploration créative
À tout moment, vous pouvez ouvrir votre Carnet d'écriture créative. Il propose 50 déclencheurs répartis par thème, pour :
Réveiller une mémoire sensorielle
Débloquer un moment d'écriture
Trouver un point de départ quand vous ne savez pas par quoi commencer
Certains exercices pourront venir nourrir un outil, servir de détour entre deux étapes, ou simplement vous offrir une respiration joyeuse dans le parcours.
Prenez ce dont vous avez besoin.
Laissez le reste pour plus tard.
Et surtout : écrivez à votre manière. Une page après l'autre. Un fil après l'autre.
C'est votre histoire. Personne ne peut l'écrire à votre place.

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ÉTAPE 1 — PRÉPARER LE TERRAIN
Clarifier votre élan, poser un cadre, créer les bonnes conditions.
Les premières questions qui surgissent souvent :
1
1
Est-ce que mon histoire est vraiment intéressante ?
2
2
Par où commencer ?
3
3
Et si je n'arrivais pas à aller jusqu'au bout ?
4
4
Qui suis-je pour croire que j'ai quelque chose à transmettre ?
Ces questions ne sont pas des erreurs. Elles font partie du processus. Mais si vous les laissez seules aux commandes, elles risquent de bloquer votre élan. Cette première étape est là pour les accueillir sans leur céder.
Le syndrome de l'imposteur autobiographique
Deux pensées sabotent souvent l'envie d'écrire avant même qu'elle s'exprime :
  • « Je ne suis pas assez intéressant(e). »
  • « Je ne vais pas y arriver. »
Ces doutes sont humains, universels, et même rassurants : ils montrent que vous prenez votre histoire au sérieux. L'objectif ici n'est pas de les faire taire, mais de vous donner des outils pour avancer malgré eux.

6

Le saviez-vous ?
Votre cerveau adore économiser de l'énergie. Face à une tâche nouvelle, incertaine, émotionnelle comme écrire votre histoire, il active une série de mécanismes de défense : procrastination, distraction, perte de confiance.
➡️ Heureusement, il existe une parade simple : créer des repères stables et concrets. Une intention claire, un cadre souple, un rituel régulier : ce sont des signaux de sécurité qui déprogramment la peur de mal faire.
Ce que cette étape vous aide à faire
Comprendre pourquoi vous avez envie d'écrire, ici et maintenant
Définir ce que vous souhaitez transmettre, à qui et comment
Mettre en place une routine réaliste, régulière, rassurante
Avancer avec plus de sens, de confiance, et d'ancrage intérieur
L'état d'esprit à adopter
Ne cherchez pas la perfection, ni l'exhaustivité. Cherchez l'élan. Cette première étape est un espace d'exploration, de recentrage et d'amorce. Mieux vaut commencer petit, sincère, tâtonnant, que rester figé dans le doute.
Les outils de cette étape
1
La boussole d'intention
pour clarifier ce qui vous pousse à écrire
2
Le pacte narratif personnel
pour poser vos règles du jeu
3
Le micro-rituel d'ancrage
pour installer une régularité douce et tenable

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Fiche-outil 1/3 — La boussole d'intention
Pourquoi l'utiliser
Lorsque l'on écrit sur soi, le risque de dispersion est grand. Cette boussole vous aide à revenir à l'essentiel : votre raison d'écrire. Elle vous offre un point d'ancrage auquel revenir, même lorsque surgissent les doutes, les souvenirs confus ou les découragements.
Quand l'utiliser
Dès le début de votre projet, pour poser vos bases. Puis chaque fois que vous vous sentez égaré(e), hésitant(e), ou tenté(e) d'abandonner. Elle peut aussi vous servir de repère pour mesurer votre évolution ou ajuster votre cap.
Comment l'utiliser
Installez-vous dans un endroit calme. Prenez un carnet ou une feuille. Puis, répondez librement à ces trois questions fondamentales :
  1. Pourquoi écrivez-vous maintenant cette histoire ?
  1. Qu'espérez-vous en retirer, pour vous-même ?
  1. Que souhaitez-vous transmettre, et à qui ?
Essayez d'écrire quelques lignes pour chaque question. Si cela vous semble difficile, imaginez que vous expliquez votre démarche à un ami bienveillant, sans pression de bien faire.

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Exercice pratico-pratique
Accordez-vous 15 minutes, sans distraction. Recopiez puis complétez librement les trois phrases suivantes :
1
« J'écris aujourd'hui parce que… »
2
« Ce que j'aimerais comprendre ou déposer en écrivant, c'est… »
3
« Si quelqu'un devait lire ce texte, j'aimerais qu'il en retire… »
Ne cherchez pas à être brillant(e), mais sincère. Ce texte est pour vous seul(e) — il constitue votre point de départ.
Variante possible
Vous pouvez également vous enregistrer à l'oral en répondant à ces questions. Cela permet parfois de libérer une parole plus vivante et spontanée.

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Fiche-outil 2/3 — Le pacte narratif personnel
Pourquoi l'utiliser
Quand on commence à écrire sur soi, on croit souvent qu'il faut tout raconter, tout dire, tout restituer fidèlement. Mais une autobiographie n'est pas un compte-rendu : c'est un récit choisi. Le pacte narratif vous permet de définir dès le départ votre cadre de jeu, votre voix, vos règles. C'est un contrat invisible, mais essentiel, entre vous et votre futur lecteur même si vous êtes le seul à le lire.
Quand l'utiliser
Au tout début de votre projet, pour poser une intention claire sur la forme que prendra votre récit. Mais aussi en cours de route, si vous sentez que vous vous perdez, que vous n'osez pas avancer, ou que vous vous jugez trop sévèrement.
Comment l'utiliser
Prenez un moment au calme pour répondre à ces quatre questions :
  1. À qui souhaitez-vous vous adresser ? (à vous-même ? à un proche ? à un lecteur inconnu ? à une génération ? à un enfant que vous avez été ?)
  1. Que voulez-vous transmettre à travers ce récit ? (un vécu, une force, une compréhension, une mémoire, un message ?)
  1. Quelle liberté souhaitez-vous vous donner ? (changer des noms ? mélanger les époques ? combler les blancs avec l'imaginaire ?)
  1. Quelle posture voulez-vous adopter ? (témoigner ? explorer ? transmettre ? reconstruire ? dialoguer ?)

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Exercice pratico-pratique
Écrivez une préface imaginaire de votre autobiographie, comme si elle figurait en tête de votre livre. En une page maximum, posez les bases de votre pacte narratif :
1
à qui vous vous adressez,
2
ce que vous espérez transmettre,
3
comment vous avez choisi de raconter (en toute sincérité, avec quelques silences, en mélangeant souvenirs et impressions, etc.).
N'ayez pas peur d'être personnel(le) : cette préface est pour vous. Elle servira de boussole discrète pour les chapitres à venir.
Variante possible
Si écrire une préface vous intimide, commencez par une lettre.
Par exemple : « Cher lecteur inconnu… » ou « À toi, mon enfant que je n'ai pas eu… »
Laissez venir les mots comme une adresse intime. Ce ton direct vous aidera à choisir votre distance narrative.

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Fiche-outil 3/3 — Le micro-rituel d'ancrage
Pourquoi l'utiliser
L'un des plus grands obstacles à l'écriture autobiographique, ce n'est ni le manque de temps ni le manque d'idées : c'est le fait de ne pas réussir à s'y mettre régulièrement. Un micro-rituel d'ancrage permet de transformer l'écriture en habitude douce, presque automatique, en l'associant à un geste, un lieu ou un moment familier.
Quand l'utiliser
Dès le début de votre projet, pour créer une routine réaliste et motivante. Puis chaque fois que vous sentez que l'élan faiblit, que vous attendez « le bon moment » (qui ne vient jamais), ou que l'écriture devient trop chargée émotionnellement.
Comment l'utiliser
Un micro-rituel, c'est une entrée en écriture simple, stable, courte. Il s'agit de trouver un geste ou une séquence qui vous signale : « ici, j'écris ». Ce peut être :
  • toujours écrire dans le même cahier ou au même endroit
  • allumer une bougie ou une musique particulière
  • écrire trois phrases d'échauffement (météo du jour, humeur, souvenir fugace)
  • se donner un créneau fixe de 10 minutes après le petit-déjeuner
  • relire les trois dernières lignes de la veille avant de recommencer
Le secret : ne pas viser grand. Viser régulier. Même 5 minutes par jour changent la donne si le geste devient naturel.

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Exercice pratico-pratique
Choisissez un rituel d'entrée en écriture et testez-le pendant 5 jours consécutifs.
Notez ensuite ce que vous ressentez :
1
Est-ce que cela facilite l'élan ?
2
Est-ce que cela rend l'écriture plus accessible, moins solennelle ?
3
Est-ce que ce geste pourrait devenir un repère agréable ?
Exemple de rituel simple : « Je m'installe à la même table, j'écris la date, puis trois phrases courtes sans réfléchir. Ensuite seulement, je rouvre mon projet. »
Variante possible
Associez votre micro-rituel à un élément sensoriel : une tisane, une odeur, un objet posé à côté de vous. Cela crée une ancre mentale douce et rassurante. Votre corps apprendra à reconnaître : c'est le moment d'écrire.

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ÉTAPE 2 — RETROUVER LA MATIÈRE VIVANTE
Faire confiance aux souvenirs qui remontent d'eux-mêmes.
Les questions qui surgissent souvent à ce stade :
1
1
Je n'ai pas une bonne mémoire… Est-ce que ça suffira ?
2
2
Pourquoi certains souvenirs reviennent, alors que d'autres non ?
3
3
Comment retrouver la matière de mon histoire sans tout réécrire dans l'ordre ?
Bonne nouvelle : vous n'avez pas besoin de tout vous rappeler pour écrire. Ce qui compte, ce ne sont pas les faits exacts mais les fragments encore vivants. Et souvent, ils remontent sans prévenir. Ce que vous ressentez quand une image, un objet, une odeur vous traverse — c'est là que commence le travail.

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Le saviez-vous ?
Votre cerveau est un excellent archiviste émotionnel, mais un mauvais classeur chronologique. Il stocke les souvenirs forts là où vous ne pensez pas à chercher : dans les sensations, les images, les émotions, les gestes. Et il est capable de faire remonter la bonne scène au bon moment, à condition que vous lui laissiez l'espace.
➡️ Plus vous apprenez à accueillir les éclats de mémoire quand ils surgissent, plus vous relancez cette dynamique. Et pour cela, un outil simple est indispensable : toujours avoir de quoi noter à portée de main.
Ce que cette étape vous aide à faire
Repérer les souvenirs qui remontent spontanément
Les saisir sans les juger, même s'ils semblent insignifiants
Vous entraîner à les « tirer » comme un fil de pelote
Créer une réserve vivante de matière, sans chercher à tout structurer tout de suite
L'état d'esprit à adopter
La clé ici, c'est la confiance dans votre cerveau. Il sait ce qu'il veut vous montrer. Accueillez les images, les scènes, les détails sans chercher leur sens immédiat. Notez-les dès qu'ils surgissent. Plus tard, vous comprendrez pourquoi ils sont revenus. Pour l'instant, il suffit de les cueillir comme ils viennent, sans filtre ni pression.
Les outils de cette étape
1
La carte de vie émotionnelle
Pour tracer les grands moments émotionnels de votre parcours
2
L'objet-passerelle
Pour accéder à des souvenirs à travers des objets significatifs
3
Le réveil sensoriel
Pour mobiliser vos sens et réveiller des images oubliées

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Fiche-outil 1/3 — La carte de vie émotionnelle
Pourquoi l'utiliser
Cette carte vous permet de repérer les grands moments de votre vie non pas selon un ordre chronologique, mais selon leur intensité émotionnelle. C'est un excellent point de départ pour faire émerger des scènes incarnées, vivantes, marquantes. Vous ne cherchez pas à tout dire, mais à relocaliser ce qui a compté.
Quand l'utiliser
Au début de votre projet, pour repérer la matière disponible. Ou plus tard, si vous avez l'impression de tourner en rond ou d'écrire de manière trop froide.
Comment l'utiliser
Tracez une ligne sur une feuille : elle représente votre vie. Puis placez-y des hauts et des bas émotionnels, comme une courbe qui monte et descend. Notez les événements, âges ou périodes associés, même brièvement. Ce n'est pas une frise historique : c'est une carte des intensités vécues.
Exemples :
  • Déménagement marquant à 10 ans – Dispute familiale violente à 15 ans
  • Rencontre joyeuse à 23 ans – Rupture douloureuse à 32 ans

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Exercice pratico-pratique
Prenez une feuille ou ouvrez une page de carnet.
Tracez une ligne horizontale (votre vie).
Dessinez une courbe qui monte et descend selon les hauts et les bas émotionnels.
À chaque sommet ou creux, notez un mot-clé, une date approximative, une image.
Choisissez ensuite un des pics (haut ou bas) et tentez d'écrire la scène associée, sans la juger, avec vos mots.
Variante possible
Faites cet exercice à partir d'un thème précis : les lieux de vie, les relations, les choix importants… Cela permet de créer plusieurs « cartes secondaires » utiles pour étoffer votre récit.

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Fiche-outil 2/3 — L'objet-passerelle
Pourquoi l'utiliser
Un objet, parfois insignifiant aux yeux des autres, peut contenir tout un monde. Il peut raviver un moment, un lieu, une émotion précise — sans que vous ayez besoin de réfléchir. Cet outil vous permet d'entrer dans votre mémoire par la petite porte : celle des sensations associées à un objet, qui ouvre souvent vers une scène ou un fil plus vaste.
Quand l'utiliser
Quand vous avez l'impression que « rien ne vous revient » ou que vous ne savez pas par où commencer. Quand vous êtes touché(e) par un objet retrouvé, un détail du quotidien, un objet que vous n'avez plus mais qui vous manque.
Comment l'utiliser
Choisissez un objet qui vous touche :
  • un objet que vous avez gardé sans trop savoir pourquoi,
  • un objet lié à quelqu'un, à un moment de bascule, à une ambiance,
  • ou au contraire, un objet que vous avez perdu mais dont le souvenir reste fort.
Prenez-le en main si vous l'avez encore, ou fermez les yeux si vous ne l'avez plus. Observez ce que cela fait en vous. Ne cherchez pas à raconter toute l'histoire : commencez par décrire l'objet, puis ce qu'il déclenche.

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Exercice pratico-pratique
Posez l'objet devant vous (ou visualisez-le mentalement).
Écrivez pendant 10 à 15 minutes à partir de cette consigne :
Décrivez l'objet le plus précisément possible (matière, forme, couleur, odeur, poids…).
Puis laissez venir ce qu'il vous rappelle.
Quelle scène, quelle personne, quel lieu revient avec lui ?
N'analysez pas. Racontez ce qui remonte, comme si vous tiriez un fil sans connaître la pelote.
Variante possible
Demandez à quelqu'un de vous montrer un objet que vous avez en commun (familial, banal, ancien). Utilisez-le comme point d'entrée. L'effet de surprise peut faire remonter des souvenirs inattendus.

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Fiche-outil 3/3 — Le réveil sensoriel
Pourquoi l'utiliser
La mémoire autobiographique est profondément liée aux sensations. Une odeur, un bruit, une texture suffisent parfois à faire surgir un souvenir enfoui depuis des années. Cet outil vous permet de réveiller votre mémoire sans effort mental, simplement en stimulant vos cinq sens — souvent négligés lorsqu'on cherche des souvenirs "importants".
Quand l'utiliser
Quand vous avez envie d'écrire mais que vous ne savez pas sur quoi. Quand vous sentez que vos souvenirs sont flous, lointains, ou trop "dans la tête". Quand vous souhaitez faire remonter des images riches, vivantes, inattendues.
Comment l'utiliser
Choisissez un sens à activer :
L'odorat
épices, parfums, produits ménagers...
Le goût
aliment d'enfance, plat simple, boisson oubliée
L'ouïe
morceau de musique, bruit familier, silence particulier
Le toucher
matière, vêtement, objet brut
La vue
lumière, couleur, mouvement, ambiance
Puis, laissez-vous traverser par ce que cette sensation réveille. Ne cherchez pas à comprendre tout de suite : notez ce qui remonte, même si cela semble sans lien logique.

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Exercice pratico-pratique
Pendant une journée, choisissez un sens à explorer (par exemple, l'odorat). Dès qu'une sensation vous touche, notez-la immédiatement (dans un carnet, sur votre téléphone…).
En fin de journée, reprenez vos notes. Choisissez une sensation et développez-la en une scène, une image, un fragment de souvenir.
Par exemple : "Odeur de colle blanche → souvenir de l'école → ma maîtresse de CE1 → la sensation du bureau en bois"
Variante possible
Faites un petit tour chez vous ou dans un lieu familier et cherchez à y repérer 5 détails sensoriels oubliés. Écrivez-les simplement, puis interrogez : À quoi cela me fait penser ? Où ai-je déjà senti/vu/touché cela ?

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ÉTAPE 3 — STRUCTURER SANS SE PERDRE
Choisir un point de départ, une logique, une direction souple.
Les questions qui surgissent souvent à ce stade :
1
1
Par quoi commencer ? Dois-je suivre l'ordre chronologique ?
2
2
Et si je me perds dans mes souvenirs ?
3
3
Faut-il vraiment tout raconter ?
4
4
Comment éviter de me décourager au bout de vingt pages ?
Quand la matière commence à affluer, on peut vite se sentir dépassé(e). L'envie de bien faire peut mener à la paralysie. Cette étape vous aide à poser une structure souple mais porteuse, qui vous permette de continuer sans vous perdre — et surtout, sans perdre le plaisir d'écrire.

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Le saviez-vous ?
Votre cerveau aime l'ordre, mais pas l'enfermement. Quand vous lui proposez un cadre trop rigide, il résiste. Quand vous n'avez aucun fil conducteur, il s'éparpille.
➡️ Le bon équilibre consiste à choisir un cap clair mais flexible : un fil narratif, un point d'entrée, un horizon de clôture. C'est ce que les neurosciences appellent une structure ouverte : assez solide pour avancer, assez souple pour improviser.
Ce que cette étape vous aide à faire
Choisir un point de départ engageant
Poser une logique interne (chronologique, thématique, émotionnelle…)
Imaginer une fin possible pour ne pas écrire à l'aveugle
Éviter les pièges du plan rigide ou du brouillon infini
L'état d'esprit à adopter
Pensez cette étape non pas comme un plan définitif, mais comme une carte de randonnée. Vous n'avez pas besoin de connaître chaque détour du chemin. Mais vous avez besoin d'un point de départ clair, d'un fil conducteur rassurant, et d'un repère de clôture. Cela suffit pour écrire librement, sans vous perdre.
Les outils de cette étape
1
La scène de bascule
Pour commencer par un moment fort, significatif, transformateur
2
Le canevas souple
Pour organiser vos souvenirs par thèmes, émotions ou personnages
3
Le nœud de clôture
Pour formuler une fin possible et écrire avec cap et liberté

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Fiche-outil 1/3 — La scène de bascule
Pourquoi l'utiliser
Trop souvent, on commence une autobiographie par les débuts : la naissance, l'enfance, l'école… Résultat : on s'enlise. Commencer par une scène de bascule, c'est choisir d'entrer dans votre récit là où quelque chose change. Ce peut être un tournant, un déclic, un moment de rupture ou de révélation. Cette scène donne tout de suite du rythme, de la densité, une accroche émotionnelle.
Quand l'utiliser
Quand vous avez envie de commencer à écrire sans tout planifier. Ou si vous vous sentez bloqué(e) par le poids du début. Cet outil vous aide aussi à poser les fondations d'un fil narratif, en partant d'un moment qui fait sens.
Comment l'utiliser
Fermez les yeux quelques instants et laissez venir cette question :
Y a-t-il un moment de ma vie où quelque chose a basculé ?
Un "avant/après" marquant ? Une prise de conscience ? Une scène que je revis souvent ?
Choisissez une seule scène, précise, située dans le temps et dans l'espace. Puis racontez-la comme si elle ouvrait votre livre.

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Exercice pratico-pratique
Écrivez une scène de 15 à 20 lignes maximum, avec cette contrainte :
Vous commencez en plein milieu de l'action (pas d'introduction ni de justification).
Vous utilisez le temps présent, pour renforcer l'immersion.
Vous essayez d'ancrer la scène dans un lieu, un geste, une tension.
Exemple d'amorce : « Il est 6h23. Je suis debout depuis deux heures. Devant moi, le sac est prêt. À côté, le mot que je n'ose pas relire. »
Variante possible
Si une scène ne vous vient pas tout de suite, listez trois moments où vous avez senti que "plus rien ne serait comme avant" (même pour des raisons infimes). Puis choisissez celui qui vous met le plus en mouvement, corporellement ou émotionnellement.

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Fiche-outil 2/3 — Le canevas souple
Pourquoi l'utiliser
Une des plus grandes peurs quand on écrit sur soi, c'est de se perdre ou de tourner en rond. Pourtant, un plan trop strict peut étouffer votre élan. Le canevas souple vous permet de poser une structure légère, personnalisée, qui donne du sens à votre récit sans le figer. Il s'agit de regrouper vos souvenirs par familles de sens, plutôt que de tout classer par dates.
Quand l'utiliser
Quand vous avez commencé à écrire mais que vous sentez venir la dispersion. Ou dès que vous avez assez de matière pour avoir besoin d'y voir plus clair. Ce canevas peut évoluer : pensez-le comme un fil conducteur temporaire, adaptable au fil de l'écriture.
Comment l'utiliser
Réunissez les scènes, images, fragments que vous avez déjà notés (ou ceux que vous sentez émerger). Puis, classez-les de façon libre en utilisant une des logiques suivantes :
Par thème
famille, lieux, relations, travail, ruptures…
Par personnage
moi à 7 ans, ma mère, mon oncle, mes enfants…
Par émotion dominante
peur, joie, solitude, soulagement…
Par lieux symboliques
maisons, villes, frontières…
Une même scène peut apparaître dans plusieurs catégories — c'est normal. L'idée est de repérer vos axes narratifs possibles, sans chercher une hiérarchie parfaite.

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Exercice pratico-pratique
✎ Prenez 6 à 8 fiches ou post-its (physiques ou numériques) et sur chaque fiche :
inscrivez un thème fort ou un repère marquant de votre vie (ex. : "les dimanches en famille", "ce que j'ai caché", "les étés loin de chez moi").
glissez ensuite sous chaque thème 2 ou 3 souvenirs ou fragments de scènes.
Vous venez de créer une carte mentale narrative : elle peut vous guider pour la suite, sans vous enfermer.
Variante possible
Vous pouvez aussi construire ce canevas sous forme de constellation visuelle : placez vos scènes sur une grande feuille, reliez-les avec des flèches, des couleurs, des liens libres. Ce mode intuitif est souvent très puissant.

27

Fiche-outil 3/3 — Le nœud de clôture
Pourquoi l'utiliser
On croit souvent qu'il faut avoir écrit toute son histoire pour savoir comment la finir. En réalité, imaginer une fin possible dès le départ vous donne un cap. Cela vous aide à écrire avec un sentiment de progression, et à éviter la spirale du "je ne sais pas où je vais". Ce nœud n'est pas un point final : c'est un repère symbolique à l'horizon.
Quand l'utiliser
Dès que vous sentez le besoin d'un objectif narratif, même flou. Ou si vous avez tendance à accumuler les fragments sans cohérence. Cette fin provisoire vous permet d'orienter votre écriture, même si vous la modifiez en cours de route.
Comment l'utiliser
Réfléchissez à ce que pourrait être la dernière page de votre récit. Non pas en termes de chronologie, mais en termes de ton, de scène, de sensation de clôture. Cela peut être :
une scène calme, de réconciliation ou de solitude
une lettre adressée à quelqu'un
une transmission : une phrase, un geste, un objet
un lieu où vous revenez
un silence assumé
Ce n'est pas une fin figée. C'est un nœud qui vous tire vers l'avant.

28

Exercice pratico-pratique
Imaginez que votre livre est déjà terminé. Vous tenez entre les mains la toute dernière page. Que contient-elle ?
Écrivez une scène de clôture imaginaire, en suivant votre intuition.
Où êtes-vous ?
Que se passe-t-il ?
Que ressentez-vous ?
À qui s'adresse ce moment ?
Il ne s'agit pas d'avoir la bonne fin, mais une forme de destination émotionnelle.
Variante possible
Si imaginer une scène vous semble difficile, commencez par cette phrase :
« Je veux que mon histoire laisse cette sensation : … » Laissez les mots venir. Ce sentiment guidera naturellement vos choix narratifs.

29

ÉTAPE 4 — TROUVER VOTRE VOIX NARRATIVE
Choisir la bonne distance, le bon ton, la bonne personne pour raconter.
Les questions qui surgissent souvent à ce stade :
1
1
Est-ce que je dois écrire à la première personne ?
2
2
Est-ce que mon ton est trop froid ? trop personnel ? trop oral ?
3
3
Comment éviter de me censurer ou, à l'inverse, d'en dire trop ?
4
4
Faut-il plaire, être fidèle à soi, ou trouver un équilibre entre les deux ?
Vous avez commencé à écrire, ou à rassembler votre matière. Mais quelque chose vous freine : la manière de raconter. Le regard que vous portez sur vous, la voix que vous adoptez, peuvent soit vous libérer, soit vous bloquer. Cette étape vous aide à trouver une voix juste, fluide, sincère — et surtout, qui vous ressemble.

30

Le saviez-vous ?
Le cerveau du lecteur capte en quelques lignes la cohérence d'une voix : tonalité, distance, rythme, sincérité perçue. Cette voix est un pont émotionnel. Mais elle agit aussi sur vous, auteur·e : selon la posture choisie, vous accédez à d'autres facettes de vos souvenirs.
➡️ Par exemple, écrire à la troisième personne permet parfois de déverrouiller des scènes trop chargées émotionnellement.
Ce que cette étape vous aide à faire
Tester plusieurs postures narratives (je, il/elle, tu…)
Trouver un ton qui vous soutient, plutôt que vous exposer
Ajuster la distance : entre sincérité, pudeur et mise en scène
Comprendre l'effet de votre voix sur le lecteur et sur vous-même
L'état d'esprit à adopter
Ne cherchez pas "la bonne voix" : cherchez votre voix du moment, celle qui vous permet d'écrire. Vous avez le droit de la faire évoluer, de changer de registre, d'alterner les perspectives. Il ne s'agit pas de se figer, mais de se connecter à ce qui vous met en mouvement.
Les outils de cette étape
1
Le jeu des trois voix
Pour tester différentes perspectives narratives et trouver celle qui vous libère
2
Le filtre stylistique
Pour identifier votre ton naturel et l'affiner consciemment
3
Le miroir du lecteur
Pour ajuster votre voix selon l'effet que vous souhaitez produire

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Fiche-outil 1/3 — Le jeu des trois voix
Pourquoi l'utiliser
Quand on écrit sur soi, on choisit presque par défaut la première personne : je. Pourtant, certaines scènes se libèrent davantage à la troisième personne (elle, il), ou à la deuxième personne (tu). Cette variation de voix vous permet de changer d'angle, de distance, de regard sur vous-même, et parfois de débloquer un souvenir ou de retrouver une liberté d'écriture.
Quand l'utiliser
Quand vous ne savez pas comment raconter une scène sensible. Quand vous avez l'impression d'être trop "dedans" ou, au contraire, trop froid(e). Ou tout simplement, pour expérimenter et choisir la voix qui vous permet d'avancer.
Comment l'utiliser
Choisissez une scène que vous connaissez bien : un souvenir clair, vif, chargé (positivement ou non). Puis, écrivez cette même scène trois fois, en variant la voix narrative :
À la première personne
Je suis assis(e) sur le bord du lit. Je n'ose pas regarder l'enveloppe.
À la troisième personne
Elle est assise sur le bord du lit. Elle n'ose pas regarder l'enveloppe.
À la deuxième personne
Tu es assise sur le bord du lit. Tu sais ce que contient l'enveloppe, mais tu veux encore croire à autre chose.
Observez ensuite :
  • Laquelle vous semble la plus juste ?
  • Laquelle vous libère ? Laquelle vous retient ?
  • Laquelle crée une émotion différente ?

32

Exercice pratico-pratique
Choisissez une scène importante, de 10 à 15 lignes. Réécrivez-la trois fois avec des voix différentes (je, elle/il, tu). Puis, notez vos ressentis :
Qu'est-ce que chaque version vous fait percevoir ?
Est-ce qu'une voix vous aide à dire des choses que vous n'osiez pas avec une autre ?
Vous n'avez pas à choisir maintenant, mais vous venez de découvrir des outils de narration puissants à réutiliser.
Variante possible
Testez aussi la variation de voix à l'intérieur d'un même récit. Par exemple, écrire certains souvenirs marquants à la deuxième personne pour créer une distance pudique, et revenir au "je" pour les passages plus doux ou introspectifs.

33

Fiche-outil 2/3 — Le filtre stylistique
Pourquoi l'utiliser
Votre style d'écriture est comme une lentille à travers laquelle votre histoire passe. Il peut être sobre, poétique, direct, oral, pudique, ironique… Le tout est de trouver un ton qui vous correspond, qui porte vos émotions sans vous submerger, et qui rende la lecture fluide pour vous comme pour un éventuel lecteur.
Quand l'utiliser
Quand vous sentez que ce que vous écrivez ne sonne pas juste. Quand vous vous demandez si vous êtes "trop littéraire" ou "pas assez profond(e)". Ou encore quand vous êtes tenté(e) de tout neutraliser par peur d'en faire trop.
Comment l'utiliser
Relisez un texte que vous avez déjà écrit, ou écrivez un court passage autobiographique. Puis, posez-vous ces questions :
Est-ce que j'écris comme je parle ?
Est-ce que je cherche à enjoliver ? À alléger ? À éviter certaines émotions ?
Qu'est-ce que je cache ou révèle à travers le style choisi ?
Est-ce que ce style me protège, me soutient ou me freine ?
Il ne s'agit pas de changer complètement de style, mais de prendre conscience du filtre que vous utilisez — et de choisir s'il vous convient.

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Exercice pratico-pratique
Choisissez une scène que vous avez déjà racontée ou une scène à écrire.
Écrivez-la deux fois avec des tons volontairement différents :
Version sobre
très factuelle, presque clinique
Elle a ouvert la lettre à 18h32. Le papier était blanc, l'écriture nette. Trois paragraphes, une signature. Elle l'a posée sur la table et a préparé le dîner.
Version expressive
très imagée, personnelle
Ses doigts tremblaient comme des feuilles d'automne quand elle a déchiré l'enveloppe. Les mots semblaient danser sur le papier, chacun portant un coup à son cœur déjà meurtri. Elle a senti le monde s'effondrer autour d'elle.
Puis relisez les deux, et demandez-vous :
  • Où suis-je le/la plus proche de moi ?
  • Quel style rend la scène plus lisible, plus vraie, plus forte ?
Vous pouvez ensuite affiner un ton personnel, qui n'est ni l'un ni l'autre mais un équilibre qui vous appartient.
Variante possible
Demandez à une personne de confiance de vous lire à voix haute un extrait de votre texte. Entendre votre propre style dans la voix d'un autre vous aidera à percevoir son impact réel.

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Fiche-outil 3/3 — Le miroir du lecteur
Pourquoi l'utiliser
Écrire pour soi, c'est une chose. Mais quand on envisage d'être lu, même par une seule personne, la façon de raconter change. Ce que vous écrivez entre en résonance avec quelqu'un. Cet outil vous aide à réfléchir à la place du lecteur, non pour vous censurer, mais pour ajuster consciemment votre voix : ton, distance, rythme, niveau d'intimité.
Quand l'utiliser
Quand vous commencez à envisager de partager votre texte.
Quand vous hésitez sur ce que vous êtes prêt(e) à livrer.
Ou quand vous sentez que votre texte pourrait gagner en clarté ou en impact, sans trahir votre sincérité.
Comment l'utiliser
Posez-vous ces quelques questions avant ou après l'écriture d'une scène :
  • À qui s'adresse ce passage ? À moi ? À quelqu'un ? À un lecteur inconnu ?
  • Qu'est-ce que je souhaite que le lecteur ressente ici ?
  • Ai-je envie de le toucher, de le faire sourire, de l'alerter, de le protéger ?
  • Est-ce que je garde une distance ? Est-ce que je tends la main ?
  • Est-ce que j'écris avec le lecteur, ou malgré lui ?
Ces questions ne servent pas à formater votre texte, mais à clarifier votre intention d'adresse.

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Exercice pratico-pratique
Choisissez une scène ou un fragment que vous avez écrit.
Écrivez en une ou deux phrases ce que vous aimeriez que le lecteur ressente en la lisant :
de l'empathie ?
une mise en miroir ?
de la surprise ?
de la douceur ?
Relisez ensuite votre texte : est-ce que cette intention transparaît ? Si non, modifiez une phrase ou deux pour l'amener plus clairement.
Parfois, un simple détail, une respiration, une formulation plus juste suffit à faire entrer le lecteur dans votre univers.
Variante possible
Faites lire ce passage à une personne de confiance et demandez-lui simplement :
"Qu'est-ce que tu ressens en lisant ça ?"
Ce retour miroir peut vous aider à affiner votre voix, tout en respectant ce que vous avez voulu transmettre.

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ÉTAPE 5 — NAVIGUER ENTRE MÉMOIRE ET VÉRITÉ
Assumer les flous, les reconstructions, les silences — sans perdre votre justesse intérieure.
Les questions qui surgissent souvent à ce stade :
1
1
Et si je me trompais en racontant ?
2
2
Je n'ai pas tous les éléments, ai-je le droit de combler les blancs ?
3
3
Dois-je tout dire, même ce que je ne comprends pas moi-même ?
4
4
Et si ma mémoire déformait les faits ?
Cette étape ne cherche pas à établir la vérité objective. Elle vous invite à explorer votre vérité sensible, celle qui vit dans vos souvenirs, vos émotions, vos silences. Écrire sur soi, ce n'est pas reconstituer un procès-verbal : c'est reconnaître les zones de doute, d'ombre, de subjectivité — et écrire avec elles, pas contre elles.

38

Le saviez-vous ?
Le cerveau ne stocke pas les souvenirs comme des archives, mais les reconstruit à chaque fois qu'on y accède. Cela signifie qu'il y a toujours une part de réécriture dans la mémoire.
➡️ Vouloir "dire la vérité" à tout prix crée souvent de l'angoisse inutile. Ce qui compte, c'est de rester fidèle à votre perception intérieure, et d'oser nommer les incertitudes, les blancs, les contradictions.
Ce que cette étape vous aide à faire
Écrire sans peur de "mal se souvenir"
Reconnaître et explorer les zones floues, les souvenirs partiels
Accepter les décalages entre mémoire factuelle et mémoire ressentie
Nommer les silences, sans les forcer à parler
L'état d'esprit à adopter
Vous n'êtes pas devant un tribunal. Vous êtes dans un geste d'exploration intérieure. Si un souvenir est flou, ce n'est pas un problème : c'est peut-être même une porte d'entrée vers quelque chose de plus vrai encore. Écrivez ce que vous ressentez, ce que vous vous rappelez, ce que vous devinez — et osez dire aussi ce que vous ne savez pas.
Les outils de cette étape
1
Les deux versions
Pour écrire un même souvenir de manière neutre puis ressentie
2
Le souvenir-écran
Pour interroger un souvenir tenace et découvrir ce qu'il cache
3
La carte des silences
Pour identifier ce que vous ne dites pas et pourquoi

39

Fiche-outil 1/3 — Les deux versions
Pourquoi l'utiliser
Lorsqu'un souvenir revient, on doute : Est-ce que c'est bien ce qui s'est passé ? Ou bien : Je me souviens de ce que j'ai ressenti, mais pas des détails précis.
Ce doute peut bloquer l'écriture. Pourtant, vous n'avez pas besoin d'un souvenir "vrai" pour qu'il ait de la valeur narrative et émotionnelle. Cet outil vous permet de faire coexister deux versions d'un même souvenir : celle des faits (aussi neutre que possible) et celle du ressenti (aussi personnelle que nécessaire).
Quand l'utiliser
  • Quand un souvenir vous revient mais semble flou, incertain ou contestable.
  • Quand vous sentez un écart entre ce que vous croyez avoir vécu et ce que les autres en diraient.
  • Quand vous voulez écrire malgré le doute.
Comment l'utiliser
Choisissez un souvenir précis. Puis, écrivez-le deux fois, selon deux approches :
Version "neutre" ou factuelle
  • Que s'est-il passé ? Qui était là ? Où ? Quand ?
  • Que pourrait-on dire si on regardait la scène de l'extérieur ?
  • Essayez de rester aussi sobre et descriptif que possible.
Version ressentie
  • Comment avez-vous vécu cette scène ?
  • Quelle émotion domine ? Quelle trace a-t-elle laissée ?
  • Qu'est-ce que vous en retirez aujourd'hui, en revivant ce moment par l'écriture ?

40

Exercice pratico-pratique
Sur deux colonnes ou deux pages :
Racontez la même scène d'abord de façon neutre, puis de façon incarnée.
Laissez les deux versions coexister.
Ensuite, demandez-vous : Laquelle me touche le plus ? Laquelle me ressemble ? Laquelle est la plus "juste" pour ce que je veux transmettre ?
Variante possible
Si cela vous semble difficile, commencez à l'oral. Racontez la scène à un proche, deux fois : une fois comme un témoin extérieur, une fois comme un personnage. Puis, écrivez ce qui vous a le plus frappé dans cet écart.

41

Fiche-outil 2/3 — Le souvenir-écran
Pourquoi l'utiliser
Certains souvenirs reviennent sans cesse — clairs, nets, parfois anecdotiques. Mais en les écrivant, vous avez l'impression qu'ils masquent autre chose. Ce sont peut-être des souvenirs-écrans : des images mentales très présentes qui servent à protéger une scène plus floue, plus chargée, plus difficile à revivre. Cet outil vous aide à les écouter, sans les forcer, pour voir ce qu'ils pourraient révéler.
Quand l'utiliser
Quand un souvenir vous revient de façon insistante mais que vous ne comprenez pas pourquoi.
Quand vous ressentez une disproportion émotionnelle : le souvenir semble banal, mais vous touche profondément.
Quand vous avez l'intuition que "ce n'est pas tout".
Comment l'utiliser
Choisissez un souvenir très net, très accessible, que vous avez raconté souvent — à vous-même ou aux autres. Puis, interrogez-le avec bienveillance :
  • Pourquoi ce souvenir revient-il autant ?
  • Est-ce qu'il y a un détail que je répète toujours, ou que j'évite ?
  • Est-ce que ce souvenir m'éloigne d'un autre, plus flou ?
  • Qu'est-ce que je ne dis jamais à son sujet ?
Ne cherchez pas à prouver quoi que ce soit. Il s'agit d'un travail d'attention flottante : écouter ce que votre mémoire vous montre — et ce qu'elle évite.

42

Exercice pratico-pratique
Écrivez librement à partir de cette double consigne :
"Le souvenir qui revient, c'est…"
"Mais ce que je ne dis jamais quand j'en parle, c'est…"
Laissez-vous guider par les émotions, les ruptures de rythme, les silences. Ne cherchez pas la "vérité" : cherchez le mouvement.
Variante possible
Dessinez votre souvenir comme un tableau figé : qui est où ? que fait-on ? quelle lumière ? Puis demandez-vous : qu'est-ce qui manque dans cette image ? Ce "manque" est parfois le vrai cœur du souvenir.

43

Fiche-outil 3/3 — La carte des silences
Pourquoi l'utiliser
Dans l'écriture autobiographique, ce qu'on choisit de ne pas dire est aussi important que ce qu'on raconte. Certaines zones restent floues, volontairement ou non. Il ne s'agit pas de tout révéler, mais de prendre conscience de vos silences : certains protègent, d'autres paralysent. Cet outil vous aide à les repérer, les comprendre — et décider quoi en faire.
Quand l'utiliser
Quand vous tournez autour d'un sujet sans jamais l'aborder.
Quand vous sentez qu'un "trou" dans le récit crée une tension ou un blocage.
Ou simplement pour faire le point sur ce que vous n'osez pas, ou ne souhaitez pas, écrire — et pourquoi.
Comment l'utiliser
Prenez un moment pour réfléchir à ces silences. Listez-les, sans les juger. Par exemple :
  • une période de votre vie jamais évoquée
  • une relation que vous effleurez à peine
  • un événement dont vous parlez toujours à la troisième personne
  • des mots que vous évitez systématiquement (maladie, violence, départ…)
Pour chaque silence, posez-vous deux questions simples :
  • Est-ce un choix conscient, ou une évitement automatique ?
  • Ce silence me protège, ou m'enferme ?

44

Exercice pratico-pratique
Dessinez une carte de votre autobiographie en cours, ou de votre vie si vous débutez.
Marquez les zones vides, effacées, brumeuses.
Donnez-leur un nom : "le silence sur X", "le flou autour de Y", "la pièce fermée de Z".
Puis, choisissez un seul silence et écrivez à partir de cette phrase : "Ce que je n'ai encore jamais écrit à ce sujet, c'est…"
Variante possible
Au lieu d'écrire directement sur ce que vous taisez, écrivez sur le silence lui-même :
  • Pourquoi ce sujet me dérange ?
  • Depuis quand ai-je cessé d'y penser ?
  • À quoi ressemblerait une version transformée, décalée, de ce souvenir ?

45

ÉTAPE 6 — PARLER DES AUTRES SANS TRAHIR
Évoquer vos proches avec nuance, justesse et respect, même dans les conflits.
Les questions qui surgissent souvent à ce stade :
1
1
Ai-je le droit d'écrire sur quelqu'un qui ne m'a rien demandé ?
2
2
Dois-je changer les prénoms ? flouter les faits ? demander l'accord ?
3
3
Comment dire ce qui m'a blessé(e) sans accuser ?
4
4
Comment rendre un portrait juste, sans idéaliser ni juger ?
Écrire sur soi, c'est presque toujours écrire sur les autres. Parents, frères, sœurs, amis, amours, collègues… Chacun a laissé une trace. Cette étape vous aide à trouver votre juste place : celle d'un narrateur honnête et responsable, qui assume sa vision sans imposer sa vérité.

46

Le saviez-vous ?
Le cerveau est programmé pour reconnaître les visages, les intentions, les liens : même un récit très intime est lu comme une cartographie relationnelle. Le lecteur ressent si un portrait est injuste, caricatural ou sincère.
➡️ L'écriture est donc un acte relationnel, même silencieux. Poser une intention claire, une distance juste, un cadre respectueux, vous permet d'écrire plus librement.
Ce que cette étape vous aide à faire
Écrire sur les autres sans vous autocensurer ni blesser inutilement
Choisir ce que vous révélez, ce que vous transformez, ce que vous gardez pour vous
Rendre les portraits nuancés, même dans la douleur ou le conflit
Prendre conscience de votre rôle de narrateur et de ses effets
L'état d'esprit à adopter
Vous n'êtes ni juge, ni procureur, ni biographe officiel. Vous êtes témoin de votre propre expérience. Il ne s'agit pas d'accuser ou de blanchir, mais de raconter ce qui vous a traversé, affecté, façonné — avec justesse et pudeur. Parler des autres, c'est aussi éclairer votre propre histoire.
Les outils de cette étape
1
Le portrait sensible
Pour décrire une personne avec empathie et nuance, sans jugement
2
Le pacte de discrétion
Pour définir ce que vous révélez et ce que vous gardez privé
3
La lettre non envoyée
Pour exprimer ce que vous n'avez jamais pu dire, en toute sécurité

47

Fiche-outil 1/3 — Le portrait sensible
Pourquoi l'utiliser
Lorsque vous écrivez sur quelqu'un d'autre, vous balancez souvent entre deux écueils : l'idéalisation (le héros de votre mémoire) ou le règlement de comptes. Ce portrait sensible vous permet de décrire une personne en profondeur, dans ses paradoxes, sans la figer ni l'édulcorer. C'est un outil d'écoute, de mémoire et d'humanité.
Quand l'utiliser
Quand une personne importante de votre histoire revient souvent, sans que vous sachiez comment en parler.
Quand vous écrivez un passage où cette personne joue un rôle central.
Ou quand vous ressentez un blocage : "Je ne veux pas trahir" / "Je ne sais pas comment la/le montrer autrement qu'en bien ou en mal."
Comment l'utiliser
Choisissez une personne réelle qui a compté dans votre histoire. Puis, répondez par écrit aux questions suivantes, sans ordre imposé :
  • Quels gestes, attitudes, expressions lui sont propres ?
  • Qu'est-ce que vous aimiez (ou redoutiez) chez elle ?
  • Quelle scène résume votre lien ?
  • Quelle odeur, quelle voix, quelle posture vous revient en pensant à elle/lui ?
  • Que dirait-elle ou il de vous, si on lui posait la question aujourd'hui ?
Cherchez à incarner, pas à juger. Écrivez pour rendre vivant, pas pour convaincre.

48

Exercice pratico-pratique
Écrivez un portrait en une page, sans utiliser les mots "gentil", "méchant", "adorable", "dur"…
Racontez cette personne par ce qu'elle fait, dit, provoque en vous, sans l'étiqueter.
Laissez les détails parler à votre place.

Exemple :
Elle préparait toujours trop de thé. Elle posait la théière entre nous comme une barrière. Elle ne posait jamais de question, mais elle écoutait tout. Et elle tricotait — même en été.
Variante possible
Écrivez un portrait à travers un lieu ou un objet : la voiture de votre père, la cuisine de votre grand-mère, le sac de votre sœur… Ces éléments indirects permettent souvent de dire davantage avec pudeur.

49

Fiche-outil 2/3 — Le pacte de discrétion
Pourquoi l'utiliser
Écrire sur soi implique parfois d'écrire sur les autres, sans leur consentement explicite. Ce pacte vous aide à définir consciemment vos zones de discrétion : ce que vous voulez taire, ce que vous souhaitez transformer, et pourquoi. Ce n'est pas un acte de censure, mais de respect et de responsabilité narrative. Il vous permet aussi de retrouver de la liberté : ce que vous décidez de protéger n'est plus un blocage, mais un choix assumé.
Quand l'utiliser
Quand vous hésitez à écrire sur une personne encore vivante.
Quand vous vous censurez trop fort — ou que vous craignez les conséquences d'une révélation.
Ou en fin de premier jet, pour relire votre texte avec lucidité sur ce que vous souhaitez vraiment garder.
Comment l'utiliser
Posez à plat, sans tabou ni obligation, les éléments suivants :
  • Quelles scènes ou informations vous semblent trop sensibles pour être partagées telles quelles ?
  • Sur quels points êtes-vous prêt(e) à changer un prénom, un lieu, un détail ?
  • Qu'aimeriez-vous garder entre vous et la page, même si vous écrivez sur le sujet ?
  • Quels silences souhaitez-vous respecter par fidélité, pudeur ou équilibre personnel ?
L'idée n'est pas de justifier vos choix, mais de les rendre explicites pour vous-même.

50

Exercice pratico-pratique
Rédigez votre propre "clause de discrétion" : une note personnelle, d'une page maximum, dans laquelle vous formulez les règles du jeu que vous vous donnez.
Cela peut commencer par :
  • "Dans ce récit, je choisis de protéger…"
  • "Je transforme volontairement…"
  • "Je garde pour moi…"
Vous pouvez garder ce pacte privé ou le glisser en postface plus tard si vous le souhaitez. Il peut aussi évoluer.
Variante possible
Si la rédaction directe vous bloque, faites une carte mentale des noms, scènes ou relations sensibles. Entourez en rouge ce que vous ne voulez pas dire. En orange ce que vous pouvez transformer. En vert ce que vous assumez pleinement. Cette visualisation vous aidera à écrire avec clarté et souplesse.

51

Fiche-outil 3/3 — La lettre non envoyée
Pourquoi l'utiliser
Certaines choses n'ont jamais été dites — par peur, par loyauté, par impossibilité. Cette lettre permet de donner une voix à ce qui a été retenu, sans filtre, sans censure, sans destinataire réel. Elle n'a pas besoin d'être envoyée ni intégrée à votre récit final. Elle agit comme un sas narratif, un espace pour déposer ce que vous ne pouvez (ou ne voulez) pas raconter autrement.
Quand l'utiliser
  • Quand une personne revient sans cesse dans votre esprit mais que vous n'arrivez pas à écrire sur elle.
  • Quand une émotion vous bloque (culpabilité, colère, confusion, tristesse).
  • Ou quand vous sentez qu'un non-dit entrave votre liberté d'écrire.
Comment l'utiliser
Écrivez une lettre adressée à cette personne, vivante ou disparue, réelle ou symbolique. Commencez simplement : « Je t'écris aujourd'hui parce que… »
Laissez venir ce que vous avez à dire — sans souci de forme, sans filtre.
Vous pouvez y déposer des regrets, des accusations, de la gratitude, des incompréhensions, des secrets, des demandes…
Vous pouvez écrire plusieurs lettres à la même personne, à des moments différents.

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ÉTAPE 7 — ÉCRIRE SANS SE SUBMERGER
Écrire sur ce qui remue sans se mettre à nu ni perdre pied.
Les questions qui surgissent souvent à ce stade :
1
1
J'ai peur de rouvrir des blessures…
2
2
Et si écrire me faisait plus de mal que de bien ?
3
3
Dois-je tout affronter frontalement ?
4
4
Comment parler de ce que je n'arrive même pas à nommer ?
Quand on touche à des souvenirs douloureux, ambigus, ou profondément enfouis, l'écriture peut devenir un terrain instable. Cette étape vous aide à trouver une juste distance : ni évitement, ni surexposition. Elle vous propose des stratégies narratives pour parler sans vous briser, dire sans vous dissoudre, avancer sans violence.

53

Le saviez-vous ?
Votre cerveau dispose d'un mécanisme de protection appelé "focalisation contrôlée" : il peut aborder des sujets sensibles de manière indirecte, symbolique, fragmentaire — sans pour autant trahir la vérité émotionnelle.
➡️ En narration, cela donne la métaphore, l'objet symbolique, la mise en scène distanciée. Ces outils permettent d'exprimer l'indicible sans se noyer dedans.
Ce que cette étape vous aide à faire
Écrire sur des sujets sensibles sans brutalité
Mettre en scène sans s'exposer directement
Utiliser des formes symboliques pour évoquer ce qui ne peut être dit de front
Doser votre implication émotionnelle pour écrire avec sécurité
L'état d'esprit à adopter
Vous avez le droit d'écrire à votre rythme, par détour, par fragments, par images. Vous êtes aux commandes. Il n'y a ni urgence, ni obligation de tout dire. Votre histoire mérite d'être racontée — mais pas au prix de votre équilibre émotionnel. Cette étape vous redonne le pouvoir de choisir comment, quand, et jusqu'où vous allez.
Les outils de cette étape
1
Le bouclier narratif
2
Le détour symbolique
3
La fenêtre d'intensité

54

Fiche-outil 1/3 — Le bouclier narratif
Pourquoi l'utiliser
Certains souvenirs sont encore vifs, douloureux ou confus. Les affronter de front peut être trop violent. Le bouclier narratif est une technique qui vous permet de mettre en scène ces moments sans vous exposer directement, en créant une légère distance protectrice stylistique, temporelle, ou structurelle. Il ne s'agit pas de fuir, mais de raconter autrement, pour garder la main sur ce que vous donnez.
Quand l'utiliser
Quand une scène vous remue trop pour être racontée à la première personne. Quand vous hésitez à écrire sur un sujet encore sensible. Ou quand vous sentez que vous vous bloquez par peur d'être trop "à nu".
Comment l'utiliser
Choisissez un souvenir que vous sentez "trop près", trop fort. Puis, transformez l'un de ces paramètres pour créer un effet de distance :
Changez la voix narrative : passez du "je" à "elle/il" ou "tu".
Déplacez la scène dans un autre lieu ou une autre époque, fictive si nécessaire.
Faites parler un autre personnage (réel ou imaginaire) à votre place.
Utilisez un objet, une action ou un décor comme point focal, et laissez l'émotion se glisser autour.

55

Exercice pratico-pratique
Choisissez une scène que vous n'avez encore jamais osé écrire.
Puis, appliquez une ou plusieurs protections narratives :
Racontez cette scène à la troisième personne.
Commencez par décrire un lieu ou un objet central, et laissez le reste venir en arrière-plan.
Introduisez un personnage fictif ou anonyme (ex. : "Un homme est assis seul sur le banc, le dos tourné à ce qui vient de se passer…")
Écrivez pendant 15 minutes sans relire.
Variante possible
Écrivez cette scène comme un rêve. Ce format autorise les flous, les images absurdes, les symboles, et vous permet de dire sans expliquer.

56

Fiche-outil 2/3 — Le détour symbolique
Pourquoi l'utiliser
Quand les mots directs sont trop lourds, trop crus ou trop douloureux, le symbole devient une voie d'accès douce, puissante, et souvent plus évocatrice. Le détour symbolique permet de faire ressentir sans nommer, de dire sans tout révéler. Il respecte à la fois votre sécurité intérieure et l'intelligence émotionnelle du lecteur.
Quand l'utiliser
Quand un sujet reste impossible à écrire tel quel, mais que vous sentez qu'il a besoin d'exister dans le texte.
Quand l'émotion déborde dès que vous approchez d'un souvenir.
Ou quand vous sentez que ce qui doit être transmis est plus fort sous forme d'image que de récit linéaire.
Comment l'utiliser
Trouvez une image, un geste, un objet ou une situation qui évoque, sans expliquer. Cela peut être :
  • Une métaphore naturelle : un orage, un effondrement, une fleur fanée.
  • Un objet chargé : un manteau oublié, une boîte jamais ouverte, une tasse cassée.
  • Un rituel muet : refermer une porte, brûler une lettre, tracer une ligne.
  • Une scène fictive mais symbolique : un enfant qui se cache, une pièce interdite, une main tendue qu'on ne saisit pas.
Puis, racontez la scène symbolique comme si elle était réelle.

57

Exercice pratico-pratique
Choisissez un souvenir trop sensible pour être écrit frontalement.
Puis, faites une liste de symboles potentiels qui vous évoquent ce moment.
Quelles images vous viennent ?
Y a-t-il un objet, une sensation, un lieu qui vous “résume” ce que vous ressentez ?
Ensuite, écrivez une scène imagée autour de ce symbole. Ne nommez pas directement ce que vous évoquez : laissez le sens affleurer.
Variante : Le texte poétique
Écrivez un court texte poétique ou fragmentaire, inspiré d'un haïku, d'une prière, ou d'une chanson intérieure. Le langage symbolique peut alors se glisser entre les lignes, sans structure formelle, permettant de dire sans expliquer.

58

Fiche-outil 3/3 — La fenêtre d'intensité
Pourquoi l'utiliser
Écrire sur soi, surtout dans des zones sensibles, peut être épuisant. Pas seulement parce que les souvenirs sont difficiles, mais parce que vous vous investissez trop d'un coup. Cet outil vous permet de mesurer votre niveau d'implication émotionnelle et d'écrire à l'intérieur d'une zone soutenable — ni trop distante, ni trop bouleversante. Il ne s'agit pas
de tout dire à chaque séance, mais de choisir ce que vous êtes prêt(e) à affronter aujourd'hui.
Quand l'utiliser
1
Quand vous vous sentez vidé(e) après avoir écrit.
2
Quand vous hésitez à aborder un sujet par peur d'être submergé(e).
3
Ou pour installer un rythme d'écriture régulier, sans effondrement émotionnel.
Comment l'utiliser
Avant chaque séance d'écriture, évaluez votre niveau d'énergie émotionnelle sur une échelle de 1 à 10.
  • En dessous de 5 : écrivez une scène douce, simple, ou un souvenir neutre.
  • Entre 5 et 7 : abordez un sujet qui touche, mais reste soutenable.
  • Au-delà de 7 : vous pouvez envisager un fragment plus intense mais avec un temps de récupération ensuite (écriture douce, promenade, pause).
Pendant ou après l'écriture, prenez un moment pour noter :
  • Est-ce que je suis encore bien dans ma "fenêtre" ?
  • Est-ce que je peux continuer ou est-il temps de faire une pause ?

59

Exercice pratico-pratique
Avant de commencer à écrire aujourd'hui, notez ceci :
Mon niveau d'énergie émotionnelle : [ /10]
Mon niveau de disponibilité intérieure : [ /10]
Puis, choisissez un sujet ou une scène adaptée à cette énergie.
→ Par exemple : "Je suis à 4/10, je vais écrire sur un objet de mon enfance."
Après l'écriture, notez :
  • Comment je me sens physiquement ?
  • Qu'est-ce que j'ai envie de faire maintenant ?
Cela vous aidera à mieux gérer votre engagement à long terme.
Variante possible
Créez une boîte de fragments doux (anecdotes légères, souvenirs apaisants, portraits tendres) dans laquelle vous pouvez piocher quand vous sentez que votre intensité du jour est basse, mais que vous souhaitez quand même écrire.

60

ÉTAPE 8 — RELIRE, RELIER, RELANCER
Revenir sur vos textes avec douceur, détecter les lignes fortes, et décider de continuer ou approfondir.
Les questions qui surgissent souvent à ce stade :
1
1
J'ai écrit des choses, mais est-ce que ça tient ensemble ?
2
2
Par quoi commencer pour relire ?
3
3
Y a-t-il des répétitions ? des incohérences ? des thèmes récurrents ?
4
4
Comment savoir s'il faut continuer, ou reprendre différemment ?
Vous avez déjà écrit — parfois beaucoup, parfois par fragments. Maintenant vient le moment de relire, non pas pour corriger, mais pour observer. Pour repérer ce qui revient, ce qui vibre, ce qui manque. Cette étape vous aide à faire émerger une cohérence souterraine, à reconnecter votre élan, et à prendre des décisions concrètes pour la suite : continuer, creuser, ou transformer.

61

Le saviez-vous ?
Le cerveau humain cherche naturellement des motifs : il relie, classe, détecte des structures implicites. En relisant vos textes, même fragmentaires, vous activez cette capacité — et souvent, vous découvrez des fils que vous n'aviez pas posés consciemment.
➡️ Relire ne sert pas à évaluer : cela permet de mieux entendre ce que vous racontez déjà.
Ce que cette étape vous aide à faire
Revenir sur vos textes sans vous juger
Identifier les thèmes, obsessions ou motifs qui reviennent
Repérer les zones floues, absentes, à creuser
Redonner un élan à votre écriture, avec clarté et confiance
L'état d'esprit à adopter
Cette étape se vit comme une écoute bienveillante. Vous n'êtes pas là pour évaluer votre style ou corriger vos fautes. Vous êtes là pour accueillir ce qui s'est dit à votre insu, mettre des mots sur ce qui revient, et ouvrir des pistes pour la suite. Il ne s'agit pas encore de "finaliser" — juste de faire du lien et relancer l'élan.
Les outils de cette étape
1
La relecture douce
2
Les fils visibles
3
Le passage oublié

62

Fiche-outil 1/3 — La relecture douce
Pourquoi l'utiliser
Relire ses propres textes peut être intimidant. Vous risquez d'y voir surtout ce qui manque, ce qui ne va pas, ce qui vous déçoit. Pourtant, cette étape peut devenir un moment précieux si vous changez de posture : lire pour écouter, non pour juger. Cette relecture douce vous aide à accueillir ce que vous avez déjà posé, et à sentir ce qui mérite d'être creusé, prolongé ou simplement laissé tel quel.
Quand l'utiliser
Quand vous avez écrit plusieurs fragments, scènes ou pages, et que vous sentez le besoin de faire le point.
Quand vous doutez de la cohérence de l'ensemble.
Ou quand vous souhaitez simplement reprendre contact avec votre propre matière, en vue de relancer l'écriture.
Comment l'utiliser
Posez-vous dans un endroit calme. Prenez vos textes comme s'ils avaient été écrits par quelqu'un d'autre. Lisez-les à voix haute ou à voix intérieure, lentement. Puis, répondez à ces quelques questions, sans pression de bien faire :
  • Qu'est-ce qui me touche encore aujourd'hui ?
  • Quelle phrase, quel passage sonne juste, fort, vrai ?
  • Qu'est-ce qui me laisse curieux(se), surpris(e), ému(e) ?
  • Y a-t-il des répétitions ? Des motifs ? Des blancs à combler ?
  • Est-ce que certaines scènes appellent une suite, une précision, une autre voix ?

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Exercice pratico-pratique
Imprimez ou recopiez trois extraits de votre texte (10 à 15 lignes chacun). Sous chaque extrait, écrivez trois choses :
Une force que vous percevez (image, sincérité, rythme, ton…)
Une question que ce passage soulève ou laisse ouverte
Une piste pour aller plus loin (prolongement, changement de point de vue, autre scène…)
Variante possible
Faites une relecture orale à deux voix : vous lisez un extrait à une personne de confiance,
qui n'a pas besoin de commenter. Puis, vous échangez sur ce que vous ressentez l'un et l'autre. Cela permet de ressentir l'impact réel de votre texte — et de vous reconnecter à sa puissance.

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Fiche-outil 2/3 — Les fils visibles
Pourquoi l'utiliser
Quand vous écrivez sur vous, certains éléments reviennent d'eux-mêmes : des lieux, des gestes, des émotions, des figures récurrentes… Ce sont des "fils" invisibles que vous avez commencé à tisser sans le savoir. Les repérer permet de mieux comprendre ce que votre récit cherche à dire, et d'orienter la suite avec plus de cohérence et de justesse sans ajouter de complexité.
Quand l'utiliser
Quand vous avez déjà écrit plusieurs textes, scènes ou fragments.
Quand vous avez le sentiment de vous répéter — ou au contraire de partir dans tous les sens.
Ou simplement pour faire émerger la colonne vertébrale de votre récit, sans effort de planification.
Comment l'utiliser
Relisez plusieurs de vos textes (3 à 5 minimum) à la suite. Puis, sur une feuille ou un tableau, notez :
  • Quels lieux reviennent souvent ? (ville, maison, forêt, voiture…)
  • Quels gestes ou actions vous décrivez à plusieurs reprises ? (attendre, se taire, ranger, marcher…)
  • Quelles émotions dominent ? (colère, solitude, soulagement, admiration…)
  • Y a-t-il des mots-clés ou images qui apparaissent sans que vous les ayez vraiment choisis ?
  • Quelles figures relationnelles sont centrales ? (la mère, l'ami, l'enfant, l'inconnu…)
Notez ces éléments sans chercher à les organiser : la répétition est déjà une révélation.

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Exercice pratico-pratique
Créez une carte des motifs récurrents à partir de vos textes.
Au centre : vous, ou votre voix d'auteur.
Autour : les éléments qui reviennent (lieux, gestes, mots, émotions).
Reliez-les librement avec des flèches, des couleurs, des intuitions.
Cette carte vous servira de boussole pour la suite : vous pouvez l'enrichir, y revenir, ou l'utiliser pour choisir la prochaine scène à écrire.
Variante possible
Transformez ces motifs en questions d'approfondissement. Par exemple, si "le silence" revient souvent :
  • Dans quels contextes est-ce que je me tais ?
  • Qui d'autre se tait dans mon histoire ?
  • Est-ce un silence de protection, de violence, de paix ?
Ces questions ouvrent la voie à de nouvelles scènes — profondes, mais guidées.

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Fiche-outil 3/3 — Le passage oublié
Pourquoi l'utiliser
Parfois, un épisode important semble manquer. On l'a survolé, contourné ou simplement "oublié" d'en parler. Ce n'est pas toujours un refus conscient : certaines zones sont émotionnellement chargées, ou tout simplement floues dans la mémoire. Cet outil vous invite à y revenir avec douceur, en prenant un chemin indirect ou créatif pour faire émerger ce qui ne voulait pas encore se dire.
Quand l'utiliser
Quand vous repérez une coupure ou un trou dans votre récit.
Quand vous évitez toujours un même moment, une même période.
Quand vous sentez que "quelque chose manque", sans pouvoir le nommer.
Comment l'utiliser
Identifiez le passage oublié : cela peut être une période entière, une scène clé absente, un lien jamais évoqué.
Essayez d'en cerner les contours :
  1. Qu'est-ce qui vient juste _avant_ ?
  1. Qu'est-ce qui vient juste _après_ ?
  1. Que ressentez-vous à l'idée de l'écrire ? (peur, lassitude, vide, colère, flou…)
Plutôt que d'y aller frontalement, choisissez un détour narratif pour y accéder :
  1. Racontez-le à travers un personnage tiers, réel ou fictif.
  1. Commencez par un détail annexe (objet, lieu, geste) lié à cette période.
  1. Écrivez une scène d'avant ou d'après, en laissant la zone manquante comme un blanc assumé.

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Exercice pratico-pratique
Formulez une phrase qui commence ainsi :
"Ce que je n'ai pas encore écrit, c'est…"
"Entre cette scène et celle qui suit, il y a un vide que je remplis aujourd'hui par…"
Puis, écrivez pendant 10 à 15 minutes sans chercher à combler parfaitement.
Autorisez les blancs, les approximations, les images floues. Le passage oublié est parfois un point d'entrée vers une vérité plus profonde, même fragmentaire.
Variante possible
Créez une scène imaginaire qui représente symboliquement ce que vous ne parvenez pas à écrire. Par exemple, une pièce fermée, un objet trouvé, une conversation entre inconnus. Ce détour peut parfois faire émerger le souvenir réel, ou du moins, en révéler la charge émotionnelle.

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ÉTAPE 9 — FINALISER ET TRANSMETTRE
Choisir une forme, une clôture, un destinataire, pour donner à votre texte un avenir.
Les questions qui surgissent souvent à ce stade :
1
1
Est-ce que mon texte est terminé ? Comment savoir ?
2
2
Et si je veux encore rajouter des choses plus tard ?
3
3
À qui ai-je envie de transmettre ce récit ? Et sous quelle forme ?
4
4
Faut-il que ce soit publié ? Ou simplement partagé ? Ou gardé pour moi ?
Cette dernière étape vous aide à refermer un cycle d'écriture en conscience. Il ne s'agit pas nécessairement de publier un livre ou de produire une œuvre définitive, mais de choisir une fin juste pour vous : un geste, une adresse, une reconnaissance. Et d'apprendre à vivre avec ce qui reste ouvert.

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Le saviez-vous ?
Le cerveau humain a besoin de clôtures symboliques pour intégrer une expérience : ce n'est pas un arrêt, mais un passage. Un récit n'est jamais "fini" dans l'absolu, mais il peut être considéré comme accompli à un moment donné, en fonction de ce qu'il vous a permis de traverser, d'ordonner ou de transmettre.
Ce que cette étape vous aide à faire
Identifier ce que vous avez écrit (même si c'est fragmentaire)
Poser une fin choisie, plutôt qu'attendre la fin idéale
Choisir un ou plusieurs destinataires possibles
Laisser une trace, transmettre, ou simplement refermer un chapitre de vous-même
L'état d'esprit à adopter
Vous n'avez pas besoin d'avoir "tout dit" pour que ce que vous avez écrit soit valable. Vous pouvez clôturer dans l'état où vous êtes, avec les mots que vous avez. Ce que vous avez posé est un récit en soi — pas une tentative inachevée, mais une forme cohérente d'un moment de votre vie.
Les outils de cette étape
1
Le point d'arrêt
2
La 4ème de couverture
3
Le geste de clôture

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Fiche-outil 1/3 — Le point d'arrêt
Pourquoi l'utiliser
Quand on écrit sur soi, la tentation de continuer indéfiniment est forte. Des souvenirs reviennent. La vie n'est pas finie. Le texte pourrait toujours être enrichi, précisé, affiné. Pourtant, il arrive un moment où vous sentez que vous avez atteint une forme de suffisance. Ce n'est pas une fin parfaite. C'est votre point d'arrêt : un moment choisi pour refermer, transmettre ou simplement poser un point de suspension.
Quand l'utiliser
Quand vous avez écrit une matière suffisante pour en ressentir l'unité — même si elle est fragmentaire.
Quand l'envie d'écrire se transforme : plus calme, moins urgente.
Quand vous sentez qu'il est temps de sortir du récit pour le laisser vivre par lui-même.
Comment l'utiliser
Commencez par reconnaître que vous n'avez pas besoin d'avoir tout dit pour clôturer. Votre récit ne sera jamais définitif — mais il peut être accompli à ce stade de votre parcours.
Interrogez-vous :
  • Qu'est-ce que j'ai posé d'essentiel dans ce texte ?
  • Qu'est-ce que je ne veux pas ou plus explorer maintenant ?
  • Est-ce que ce que j'ai écrit me semble juste, même si ce n'est pas complet ?
  • Ai-je besoin de garder une porte ouverte, ou de la refermer symboliquement ?

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Exercice pratico-pratique
Rédigez une courte note intitulée "Pourquoi je m'arrête ici".
En 10 lignes, formulez :
Ce que vous avez raconté
Ce que vous laissez de côté, volontairement
Ce que ce texte a changé pour vous
Ce texte n'a pas à figurer dans le manuscrit. C'est un acte de clôture intérieure.
Variante possible
Créez une "page blanche" volontaire : une page vide à la fin de votre document, datée, avec un simple mot, une phrase, un signe. Cette absence affirmée est parfois plus forte qu'un dernier mot. C'est votre manière de dire : pour l'instant, cela suffit.

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Fiche-outil 2/3 — La quatrième de couverture imaginaire
Pourquoi l'utiliser
Il n'est pas toujours facile de savoir ce que l'on a vraiment écrit — surtout quand on a avancé par fragments. Imaginer la quatrième de couverture de votre texte vous oblige à prendre une vue d'ensemble, à formuler ce que vous avez exploré, et à nommer la valeur de ce que vous avez créé. C'est un excellent outil de synthèse, mais aussi de projection.
Quand l'utiliser
  • Quand vous arrivez à la fin d'un cycle d'écriture, même incomplet.
  • Quand vous avez envie de voir "ce que vous avez en main".
  • Ou quand vous commencez à penser à une transmission (à un proche, un éditeur, un lecteur potentiel).
Comment l'utiliser
Imaginez que ce que vous avez écrit forme un livre réel. Que trouverait-on en 4e de couverture ?
Formulez une présentation synthétique, qui pourrait répondre à ces éléments (même si vous ne les utilisez pas tous) :
Ce que le lecteur va découvrir (un parcours, une ambiance, une voix)
Les thèmes abordés
Le ton ou le style
Ce que cela raconte, au fond, de l'humain
À qui cela pourrait parler
Ce que vous avez appris en l'écrivant

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Exercice pratico-pratique
Rédigez une quatrième de couverture fictive de 10 lignes maximum.
Adressez-vous à un lecteur inconnu, bienveillant, curieux.
Mettez-vous dans la peau de quelqu'un qui ne vous connaît pas, mais qui pourrait être touché par votre histoire.
Vous pouvez commencer par : "C'est l'histoire d'un regard posé sur…" "À travers une suite de fragments intimes, ce récit explore…" "Écrit entre silences et éclats, ce texte retrace…"
Variante possible
Rédigez plusieurs quatrièmes différentes, selon différents destinataires :
  • Une version pour vous-même (bilan intérieur)
  • Une version pour un proche (transmission intime)
  • Une version pour un lecteur inconnu (projection publique)
Comparer ces versions peut vous aider à choisir la forme de transmission qui vous correspond le mieux.

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Fiche-outil 3/3 — Le geste de clôture
Pourquoi l'utiliser
Écrire sur soi ouvre souvent un long processus intérieur. Il est rare que l'on se dise un jour "c'est fini" — pourtant, marquer une fin symbolique est essentiel. Cela vous permet de prendre acte de ce que vous avez accompli, de poser une respiration, et de laisser votre texte exister. Ce geste de clôture peut être discret ou solennel, intime ou partagé : il vous appartient.
Quand l'utiliser
Quand vous sentez que quelque chose est allé au bout, même si tout n'est pas parfait ni complet.
Quand vous avez envie de poser un point final émotionnel, même provisoire.
Ou quand vous vous sentez prêt(e) à transmettre, relire, ranger, ou simplement tourner une page.
Comment l'utiliser
Choisissez un geste personnel, simple, qui marque la fin d'un cycle. Cela peut être :
Écrire une phrase de clôture que vous seul(e) connaissez
Créer une mise en page finale (photo, titre, signature, date)
Lire votre texte à voix haute, seul(e) ou devant un proche
Ranger le manuscrit dans un endroit spécial
L'imprimer ou l'enregistrer symboliquement
Brûler, enterrer ou enfermer une version volontairement inachevée
Ce n'est pas une mise au rebut : c'est une consécration discrète.

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Exercice pratico-pratique
Prenez un temps seul(e), au calme. Demandez-vous : "De quoi ai-je besoin pour savoir que ce cycle est accompli ?"
Puis, choisissez un geste concret qui traduise cela. Vous pouvez l'accompagner d'une courte phrase :
  • "Je referme ce carnet avec gratitude."
  • "Ce texte a fait son chemin."
  • "Je rends ce fragment à la mémoire."
Variante possible
Faites de ce geste un rituel récurrent : chaque fois que vous terminez un cycle d'écriture, inventez un signe de clôture. Cela installe une écriture rythmée, vivante, respectueuse de vos temps intérieurs.

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Pour conclure… sans tout refermer
Vous avez accompli cette traversée d'écriture, page après page, outil après outil. Vous avez puisé dans la mémoire et l'émotion, affronté les doutes et exploré des scènes oubliées. Vous avez trouvé votre voix et laissé une trace, à votre façon et à votre rythme.
Cette boîte à outils ne visait pas à vous faire tout dire, mais à vous encourager à dire vrai, à dire assez, et à dire ce que vous étiez prêt(e) à confier aujourd'hui.
Écrire sur soi est bien plus qu'une affaire de mémoire ou de style. C'est un acte de conscience, de liberté, et parfois de réparation. C'est aussi une forme d'amour pour ce que vous avez été et pour ce que vous êtes encore en train de devenir.
Que reste-t-il à faire maintenant ? Peut-être un geste simple pour refermer doucement ce cycle. Ou une page, une seule, écrite pour quelqu'un, même si elle ne quitte jamais vos mains. Ce n'est pas une obligation, mais un cadeau. Et c'est là que se révèle le dernier outil.

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Fiche-bonus — Le texte-cadeau
Pourquoi l'utiliser ?
Écrire pour soi est un acte fondateur. Mais un mot, une page, ou un fragment peut vouloir aller vers quelqu'un. Ce texte vous aide à choisir une personne réelle ou imaginaire à qui adresser un morceau de votre histoire, pour transmettre un souvenir, une reconnaissance, une vérité, ou une simple trace.
Quand l'utiliser ?
Utilisez cette approche lorsque vous sentez que ce que vous avez écrit mérite d'être transmis, même sous une forme simple. C'est idéal aussi quand une personne spécifique revient dans votre esprit durant l'écriture, ou lorsque vous cherchez une manière concrète et significative de clore un cycle.
Comment l'utiliser ?
Choisissez d'abord un destinataire : un proche (vivant ou disparu), un enfant, un lecteur inconnu, ou même une version future ou passée de vous-même. Puis, déterminez ce que vous souhaitez transmettre : une expérience, une émotion, une leçon de vie, une mémoire oubliée, ou un message jamais osé.
Laissez le texte se dérouler comme un geste d'offrande, simple et sincère.

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Exercice pratico-pratique
Écrivez une page adressée à une personne de votre choix.
Vous pouvez commencer par :
  • "Je t'écris cette page parce que je n'ai jamais su comment te dire…"
  • "Voici ce que j'aimerais que tu saches, si un jour tu lis ces lignes…"
  • "J'ai écrit tout ça pour mieux comprendre, mais aujourd'hui, c'est à toi que je veux remettre ce morceau."
Ne cherchez pas à être exhaustif(ve), ni parfait(e). Ce texte est un pont, pas un bilan.
Variante possible
Transformez ce texte en objet : une lettre manuscrite, une carte, un cahier, une photo annotée. Vous pouvez le transmettre réellement — ou choisir de le garder pour vous, comme un acte accompli.

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